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Mon expérience avec la saison 2 de The Last of Us

Attention, cet article contient des spoilers majeurs sur la saison 2 de The Last of Us. Si vous n’avez pas encore vu la série ou souhaitez éviter les révélations, passez votre chemin ! Notez également que cette saison ne couvre pas l’intégralité de l’histoire du jeu The Last of Us Part II, mais se concentre sur une partie de son intrigue, laissant certains arcs narratifs pour une potentielle suite.

Dès les premières minutes de la saison 2 de The Last of Us, un sentiment de désarroi m’a saisie, comme une fausse note dans une mélodie que j’attendais avec ferveur. Après l’élégance narrative de la première saison, qui savait laisser les silences parler et les regards porter le poids des émotions, cette suite m’a donné l’impression que HBO avait décidé de prendre ses spectateurs pour des novices incapables de saisir les nuances. Chaque sentiment, chaque intention semblait devoir être exprimé à haute voix, comme si les showrunners craignaient qu’on passe à côté de l’essentiel. Les personnages, d’ordinaire si complexes, se mettent à verbaliser leurs moindres pensées, expliquant leurs motivations avec une clarté presque scolaire. Ce choix, qui tranche avec la subtilité du jeu The Last of Us Part II, m’a laissée perplexe, comme si l’on avait voulu simplifier une histoire qui tire sa force de son ambiguïté.

Pire encore, je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi les scénaristes ont choisi de révéler dès le premier épisode les raisons du meurtre de Joel par Abby. Dans le jeu, cette révélation est un puzzle que l’on assemble patiemment, une vérité qui se dévoile par fragments, laissant le joueur dans une tension constante entre choc, colère et curiosité. Ici, en exposant d’emblée le pourquoi de cet acte déchirant, la série désamorce une partie de son impact émotionnel. J’étais là, devant mon écran, abasourdie par la brutalité de la scène – fidèlement retranscrite, il faut le reconnaître – mais frustrée par cette transparence prématurée. Pourquoi priver le spectateur de ce mystère qui, dans le jeu, alimentait une réflexion profonde sur la vengeance et la perspective ? C’était comme si l’on m’avait tendu un livre dont les pages cruciales avaient été lues à voix haute avant que je puisse les découvrir moi-même.

Ajoutant à cette frustration, le rythme des épisodes, précipité par une saison réduite à seulement sept épisodes, m’a empêchée de m’installer pleinement dans cet univers. Contrairement à la première saison, qui prenait le temps de tisser une toile immersive où chaque moment comptait, cette suite semble toujours pressée, comme si elle cherchait à cocher des cases narratives sans laisser au spectateur le temps de respirer. Avec une histoire aussi riche et complexe que celle de The Last of Us Part II, ce format court donne l’impression de survoler les événements, sapant le poids dramatique des instants clés. Les scènes s’enchaînent à un rythme effréné, ne laissant pas assez d’espace pour que les dilemmes moraux ou les émotions brutes s’ancrent profondément. C’était comme regarder un paysage magnifique depuis un train à grande vitesse : on en perçoit la beauté, mais on n’a pas le temps de s’y arrêter. Je ne comprends vraiment pas ce choix de rusher cette saison, surtout quand la production ambitionne de couvrir l’intégralité du jeu en trois saisons, jusqu’à une potentielle saison 4.

Mais d’où vient ce déséquilibre ? Je me demande si le problème ne réside pas dans le budget colossal de la série. Les décors somptueux, les effets visuels saisissants et la multitude de personnages – tous impeccablement incarnés – témoignent d’une ambition démesurée. Chaque plan semble pensé pour impressionner, des ruines envahies par la végétation aux affrontements viscéraux contre les infectés. Pourtant, cette opulence visuelle semble avoir un coût : des scènes cruciales, qui auraient pu approfondir les relations ou les conflits intérieurs, paraissent sacrifiées au profit de moments spectaculaires. Les arcs narratifs, comme celui d’Ellie ou des personnages secondaires, auraient pu gagner en profondeur si la série s’était autorisée à ralentir, à privilégier l’intime sur le grandiose. Ou peut-être que le problème est ailleurs, dans une mécompréhension du matériau d’origine par les showr unners.

Il est facile de pointer du doigt les libertés prises par les showrunners vis-à-vis du jeu. La première saison avait pourtant montré que ces ajouts pouvaient être une franche réussite, comme l’épisode inoubliable de Bill et Frank, qui enrichissait l’univers tout en restant fidèle à son essence. Mais dans cette saison 2, les nouvelles scènes, souvent substituées à des moments clés du jeu, manquent de la même force. Loin d’enrichir le récit, elles laissent un goût de frustration, comme si elles ne parvenaient pas à égaler la profondeur ou l’audace des séquences qu’elles remplacent. Là où la première saison semblait sublimer l’histoire du jeu, cette deuxième donne l’impression que les producteurs ont perdu de vue ce qui faisait la puissance du matériau d’origine. L’écriture manque de cette radicalité qui définissait le jeu, optant pour une approche trop prudente qui amoindrit l’intensité du récit. Après la mort de Joel, la série se concentre presque uniquement sur Ellie, dont l’arc souffre particulièrement de cette écriture hésitante, alors qu’un choix plus courageux aurait pu être de plonger immédiatement dans le parcours d’Abby, d’explorer son point de vue après cet acte bouleversant, comme le jeu l’avait fait avec une audace narrative inégalée.

Je trouve cependant la fin plutôt réussie. Elle capture l’esprit du jeu tout en introduisant des nouveautés, bien que souffrant toujours de ce rythme précipité et de l’omniprésence de décors trop grandioses. Tout va trop vite, trop court. Mais la fin est sauvée par le cliffhanger du théâtre, un moment de tension brute qui m’a clouée à mon siège, et par la prestation saisissante de Kaitlyn Dever, dont la performance incarne toute la complexité du personnage qu’elle porte. Ce final, malgré ses défauts, rallume une étincelle d’espoir pour la suite.

Malgré tout, je considère cette saison comme une adaptation décevante, pour une multitude de raisons – du rythme frénétique à une écriture parfois maladroite. Pourtant, elle reste une série captivante à bien des égards. Les acteurs, portés par une alchimie remarquable, donnent vie à des moments bouleversants, notamment les morts de certains personnages qui m’ont profondément touchée. Les musiques envoûtantes et les visuels époustouflants rappellent pourquoi cet univers continue de fasciner. Cette saison, imparfaite mais portée par une passion évidente, m’a marquée. Elle m’a montré qu’une œuvre, même avec ses défauts, peut encore résonner profondément, et elle me laisse espérer une saison 3 qui saura renouer avec l’audace et la profondeur du jeu.

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